LES MINÉRAUX CRITIQUES EN AFRIQUE : ENJEUX STRATÉGIQUES ET PERSPECTIVES RÉVÉLÉS À LA SAMAO

LES MINÉRAUX CRITIQUES EN AFRIQUE : ENJEUX STRATÉGIQUES ET PERSPECTIVES RÉVÉLÉS À LA SAMAO

La sixième édition de la Semaine des Activités Minières d’Afrique de l’Ouest (SAMAO) a réuni au Burkina Faso, du 25 au 27 septembre 2024, des experts, décideurs et professionnels de l'industrie minière pour aborder un thème crucial : « Les minéraux critiques : quelle stratégie de développement pour les pays africains ? ». Cet événement a permis de réfléchir sur l’importance stratégique des minéraux critiques pour le développement économique de l’Afrique et de définir des pistes concrètes pour que ces ressources contribuent pleinement à la croissance durable du continent.


Un Thème Central : Les Minéraux Critiques, Pilier du Développement Africain


Dans son discours d’ouverture, le ministre burkinabé de l’Énergie, des Mines et des Carrières, Yacouba Zabré GOUBA, a mis en avant l’importance des minéraux critiques comme levier de développement pour les pays africains. Il a souligné que ces ressources, vitales pour les technologies de pointe et la transition énergétique mondiale, sont stratégiques pour l’Afrique. Cependant, il est essentiel de mieux les exploiter et de mettre en place un cadre commun entre les États africains pour optimiser leur valeur ajoutée et réduire la dépendance envers les pays extérieurs. Dr Elie Justin OUEDRAOGO, parrain de l’événement, a également salué l'importance de cette initiative et a encouragé les échanges sur les stratégies nationales et régionales nécessaires pour tirer profit de ces ressources.


Vers la Production de Batteries et de Matériaux pour les Véhicules Électriques


Les discussions lors de la SAMAO ont également évoqué l’ambition de certains pays africains de participer à la production de batteries pour véhicules électriques. Doris OKOLI, coordinatrice de la communication pour Allied Gold, a partagé son optimisme concernant les avancées technologiques dans le secteur, tout en soulignant les défis du marché africain de l’électrique à quatre roues, encore limité par le manque d’infrastructures de recharge et les coûts élevés. Cependant, le marché des véhicules électriques à deux ou trois roues, qui utilise des batteries au lithium, au fer et au phosphate, offre une opportunité plus réaliste pour l’Afrique. OKOLI a également insisté sur l’importance d’investir dans des usines de fabrication de cellules et de soutenir les fabricants locaux pour une viabilité à long terme.


La Coopération Régionale au Service de l’Industrie Minérale


L’intervention d'Abdoul Moumouni ABDOULRAZAKOU, Conseiller Spécial à la Présidence du Niger, a mis en lumière la nécessité de bâtir des synergies régionales pour renforcer la position de l’Afrique dans le secteur minier mondial. « La SAMAO est une rencontre pour élaborer des synergies, particulièrement entre États, afin de promouvoir et de développer le secteur minier au profit des populations africaines », a-t-il déclaré. En harmonisant leurs stratégies, les pays africains pourraient mutualiser leurs efforts pour la valorisation locale des ressources critiques, en vue de construire un tissu industriel intégré et de répondre aux besoins énergétiques et technologiques croissants du continent.


La Question des Restrictions aux Exportations et de la Transformation Locale


Afin de stimuler les industries locales, certains pays africains, dont le Burkina Faso, ont instauré des restrictions à l’exportation de matières premières non transformées. Yacouba Zabré GOUBA a rappelé que près de 2 500 mesures d’interdiction, de quotas ou de taxes d’exportation ont été mises en place à travers le continent en 2021 pour limiter l’exportation de plus de 70 minerais et métaux. Cependant, selon Abdoul Moumouni ABDOULRAZAKOU, ces restrictions n’ont pas toujours permis d’atteindre les résultats escomptés en matière de transformation locale. En effet, dans certains cas, elles ont même affaibli la compétitivité globale des industries minières africaines. Il est donc crucial, selon GOUBA, de trouver un équilibre entre incitations à la transformation locale et maintien de la compétitivité des exportations.


La Solution des Zones Économiques Spéciales


La création de Zones Économiques Spéciales (ZES) apparaît comme une solution prometteuse pour attirer des investissements dans le secteur minier et énergétique en Afrique. Mireille Medah NANA, directrice des énergies renouvelables au Burkina Faso, a expliqué que ces zones pourraient permettre de centraliser les investissements et d’optimiser les infrastructures nécessaires à la transformation des ressources. Des projets comme la « Platinum Valley » en Afrique du Sud, dédiée à la production de piles à hydrogène, et le partenariat entre la Commission Économique des Nations Unies pour l'Afrique (CEA) et la banque Afreximbank pour une ZES de production de batteries en RDC et en Zambie, montrent la voie à suivre. Ces initiatives pourraient renforcer la compétitivité africaine sur la chaîne de valeur des minéraux critiques, tout en répondant aux besoins énergétiques et technologiques croissants du continent.


Valorisation Locale et Renforcement des Capacités


Plusieurs intervenants ont insisté sur l’urgence de transformer les minéraux sur place. Dr Bareja YOUMSSI, expert géologue du Cameroun, a plaidé pour que l’Afrique s’appuie davantage sur ses propres ressources et compétences : « Nous avons formé des ingénieurs et des techniciens depuis 50 ans. Nous sommes capables, nous pouvons le faire. Aucun pays occidental ne viendra développer l'Afrique pour nous. » Son discours a résonné comme un appel à l’action pour les pays africains à investir dans des infrastructures de transformation des minéraux critiques et à créer des emplois qualifiés pour les jeunes.


L’Exploitation Artisanale, Un Enjeu Social et Économique


Raoul Vitima WAZENGA, Directeur Général du Service Géologique de la République Démocratique du Congo, a soulevé un enjeu essentiel : l’exploitation artisanale des minéraux critiques. Ce type d’exploitation, répandue en Afrique, est souvent informelle et peu encadrée, posant des défis en matière de sécurité, de durabilité et de revenus pour les populations locales. Selon lui, « il est impératif de formaliser et de professionnaliser l’exploitation artisanale pour migrer vers une exploitation à petite échelle, permettant ainsi de créer des emplois pour nos populations ». Cette démarche vise à intégrer l’exploitation artisanale dans le tissu économique formel et à garantir que les bénéfices des ressources naturelles reviennent aux communautés locales.


Une Stratégie Commune pour un Développement Durable


Au terme de cette édition de la SAMAO, les participants ont formulé des recommandations claires pour le développement durable du secteur minier en Afrique. Parmi ces recommandations, Yacouba Zabré GOUBA a rappelé l’importance de mettre à jour les bases de données nationales sur les minéraux critiques, d’harmoniser les cadres réglementaires, de renforcer les capacités des acteurs locaux et de développer des infrastructures de transformation sur place. Il a assuré que ces propositions seraient mises en œuvre avec détermination pour garantir que les richesses du sous-sol africain profitent en priorité aux populations du continent.


Conclusion


Le succès de cette édition de la SAMAO témoigne de l'engagement des pays africains à construire un avenir où les minéraux critiques ne seront pas seulement extraits, mais également transformés pour stimuler l’économie locale et réduire la dépendance aux importations. En s'unissant autour de stratégies communes et en renforçant leurs capacités locales, les pays africains sont en bonne voie pour valoriser leurs ressources et faire de l'industrie minière un pilier de la prospérité partagée.


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